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  • Photo du rédacteurRoger Reynaud

Dirigeant, il faut sauver le soldat Manager




Si la crise sanitaire a fait du personnel soignant des héros (éphémères déjà) faute d’équipements, de préparation et sans chef ou plutôt trop, il ne faudrait pas que la crise économique, toute proportion et comparaison gardées, en fasse de même avec les managers. En effet, si pour gagner l’opinion on a besoin de héros, on a besoin pour gagner les guerres avant tout de soldats bien équipés, entrainés et bien commandés. Le parallèle peut paraître dur et inapproprié mais la guerre économique qui succède à la guerre sanitaire ne sera pas plus tendre avec les hommes et les entreprises, autant être préparé. Beaucoup d’experts économiques et du monde de l’entreprise en sont si conscients qu’ils confient au Manager de proximité, à juste titre, le rôle clé dans la reprise de l’activité de l’entreprise. Dans leurs réflexions, ces mêmes experts dressent la liste des compétences et qualités que doit posséder ce manager pour permettre à l’entreprise de surmonter la crise : « soft skills », résilience, intelligence relationnelle, bienveillance, altruisme, empathie etc … la liste est longue. A l’environnement anxiogène que tout le monde vit depuis la crise sanitaire vient s’ajouter sur les épaules du manager, la pression sociale d’une exigence professionnelle lui conférant le statut d’homme ou de femme providentielle, sous condition d’être doté d’un paquetage impressionnant pour mener ses équipes au succès. A en entendre certains, le manager du « jour d’après » devrait ainsi faire office de psychiatre, pédiatre, conseiller matrimonial, addictologue, philosophe yogi, ergonome, ostéopathe, magnétiseur… et pourquoi pas le retour de l’être cher ? Bien évidemment, le trait est volontairement grossi et provocateur d’autant que les soft skills sont essentielles et indéniables et que nombre de managers les possédaient et les exerçaient naturellement avant la crise ou bien, les ont développées durant le confinement. Cependant, ce qui a changé est le niveau de pression, d’urgence et de responsabilité sur les épaules du manager et tous ne sont pas prêts à y faire face. Mais au fait, dans quel état est-il aujourd’hui, ce manager providentiel ? Dirigeant d’entreprise, il faut sauver le soldat Manager ! 3 points de focus doivent, plus que jamais, animer le dirigeant pour supporter ses managers : 1.    Mes managers sont-ils bien équipés face à cette crise économique pour conduire au succès leurs équipes ? -Quel est leur état moral ? A l’heure de la sortie de crise sanitaire, il est plus qu’indispensable pour le dirigeant de s’assurer de l’état moral dans lequel se trouvent ses équipes et en premier lieu, ses managers. Pour mesurer leur adaptation à la crise, et leur faculté à se projeter dans de nouveaux challenges, l’inoxydable courbe du changement est un très bon outil. Il est évident qu’un manager qui n’a pas franchi les dernières étapes de la courbe du changement ne sera pas à même d’entrainer ses équipes de manière satisfaisante. A l’inverse, moins il aura mis de temps à appréhender le changement, mieux le manager aura mis son équipe en perspective d’être prête à affronter des décisions quelquefois délicates. -Savoir prendre soin de soi pour prendre soin des autres  Les spécialistes évoqueront l’auto-empathie, la résilience, les sciences cognitives, dans la faculté de s’adapter au changement et à se projeter. En tant que dirigeant opérationnel, je préfère parler de « savoir prendre soin de soi ». Je suis intimement persuadé pour l’avoir expérimenté que la connaissance de soi permet de mieux accompagner ses collaborateurs, en percevant mieux leurs émotions et donc de savoir ce qui les meut et les émeut. Il en va de la justesse de son jugement professionnel. Cette introspection et ce temps réservé à soi-même permettent de garder le recul nécessaire et de se préserver du flot émotionnel de l’extérieur, généré par la crise. Ce n’est pas de l’égoïsme, on ne peut tout simplement prêter attention aux autres et les aider que si nous nous rendons totalement disponibles. Donner de l’attention efficace à ses équipes, c’est les aider durablement à affronter les crises et les changements engendrés. -Le feed-back des managers Durant cette crise sanitaire, qu’ont appris les managers, sur eux, leurs collaborateurs, leur entreprise ? Que n’ont-ils pas compris ? Quelles sont leurs attentes et aspirations dorénavant ? Qu’est-ce qu’ils veulent changer ou voir changer ? Le dirigeant doit, quelle que soit la taille de son entreprise, chercher à connaitre la réponse à ces questions. Il lui faut avoir un baromètre de ses équipes managériales pour construire un plan d’actions de sortie de crise. Celui-ci sera d’autant plus implémenté efficacement par ses managers qu’il sera en accord avec leurs attentes. Avoir le feed-back de ses managers est primordial, également, pour juger de leur capacité à s’adapter, à apprendre de la crise par eux-mêmes. Les outils de collecte du feed-back peuvent varier suivant la taille, le climat social, la situation économique de l’entreprise. Ainsi, le dirigeant pourra faire du « face à face », demander un rapport d’étonnement, procéder à une enquête de satisfaction interne etc… -Le feed-back des équipes Il est important également d’avoir la perception des collaborateurs envers leurs managers. Le retour d’informations directes provenant des collaborateurs est très enrichissant pour le dirigeant, d’autant en situation de crise. Non pas qu’il s’agisse d’un manque de confiance envers les managers, mais avoir différentes sources d’informations permet de mieux comprendre les problématiques et d’être donc plus pertinent dans les solutions apportées. D’autre part, la présence du dirigeant sur le terrain en cette période est plus que souhaitable pour rassurer les équipes et amener son soutien à l’action quotidienne du manager de proximité. Dans une de mes précédentes expériences, j’avais pour habitude d’organiser à l’occasion de mes déplacements dans les différentes BU, des « conseils de techniciens » où j’échangeais directement avec les techniciens, sans la présence de la hiérarchie locale. J’en retirais toujours des éléments probants. Il faut néanmoins être un dirigeant expérimenté pour cet exercice et être capable d’avoir l’autorité et l’objectivité nécessaire, car l’exercice est risqué. 2.    Mes managers sont-ils bien entrainés ? La courroie d’entrainement du capital humain est pour moi la gestion des Ressources Humaines. Gestion des Ressources Humaines qui a été mise à rude épreuve durant le confinement. Les DRH ont dû s’adapter dans l’urgence à la tempête sanitaire et il faut saluer leur performance. L’heure est pourtant à la remise en cause des modèles existants et aux nouvelles orientations RH car si rien ne change, gare au retour de bâton au sein de l’entreprise « libérée » d’avant crise. Le feed-back des managers va venir alimenter, bien évidemment, ces nouvelles orientations. Quelles sont donc les tendances sociétales observées, les émotions ressenties ? En majorité des craintes et du questionnement : l’isolement, la peur, le stress, la fragilité d’un système économique, la relation au travail, etc… Mais pas que, l’émergence de la confiance dans l’équipe, de l’autonomisation, du télétravail, le renforcement de la cellule familiale… Comment intégrer ses nouvelles tendances, émotions dans la gestion RH et dans les organisations pour assurer la motivation, l’engagement, la rétention, l’attractivité des équipes, à commencer par le manager post crise ? -La confiance et la responsabilisation La confiance a souvent supplanté le contrôle en mode managérial avec notamment la généralisation du télétravail et du travail à distance. Concernant les managers, ils ont dû prendre des décisions d’urgence, déléguer, rassurer, et faire confiance à leurs équipes et à leur hiérarchie. D’ailleurs, le manager avisé aura beaucoup appris sur son équipe et sur lui-même. Cette confiance « de circonstance » doit se transformer en confiance « légitimée » car on ne peut revenir en arrière. Sans doute faudra t’il redéfinir le cadre des délégations de décision, l’entreprise « libérée » devra mériter son nom. La prise de décisions et d’initiatives devront être encouragées et valorisées. J’ai connu des entreprises dans lesquelles, plus on était responsables hiérarchiquement et moins on décidait. Un véritable drame pour le management et son intérêt. Il convient pour la RH et le top management de s’assurer pour chaque manager de sa capacité à déléguer, à responsabiliser et à mettre ses équipes en perspective de prendre des initiatives et décisions adéquates. Ce sera l’occasion également de se pencher sur le niveau de compétences, d’autonomisation des équipes et leur niveau d’homogénéité intra et inter équipes. Il ne faudra pas faire l’économie de cette phase d’évaluation, ni pour des questions de coût, ni de crainte des résultats (peut être peu valorisants pour le top management et la DRH). -L’équipe en mode tribu Le changement total des conditions de travail, l’environnement anxiogène, les questionnements de ses collaborateurs, ont poussé le manager, face à une situation imprévisible, à créer un nouveau référentiel de fonctionnement de son équipe. Il a développé, souvent seul, de nouvelles pratiques, règles de travail, établi de nouveaux rapports entre lui, son équipe et ses collaborateurs eux-mêmes, cherché des valeurs partagées de tous, trouvé de nouveaux objectifs communs, dans le but de maintenir au mieux l’activité de l’entreprise. Il aura finalement créé un nouvel écosystème où tout le monde trouve sa place, son rôle et où l’affect est omniprésent, une véritable tribu avec son identité propre. Une tribu où le manager trouve un espace de liberté managériale qu’il n’a jamais eue auparavant, jusqu’à créer une « micro- culture d’entreprise ». Le retour au travail post confinement ne doit pas revenir sur ce nouvel équilibre au sein de l’équipe. Au contraire, il doit le confirmer afin de renforcer les impacts positifs : dialogue, créativité, adaptabilité, valeurs, fierté d’appartenance et raison d’être de chacun dans la tribu. La dynamique des différentes tribus, leurs spécificités peuvent être un formidable levier pour surmonter la crise. Au dirigeant d’être suffisamment habile pour canaliser et unifier ces énergies positives afin de bâtir une vision globale partagée. 3.    Mes managers sont-ils bien commandés ? -Faut-il changer, ajuster l’équipe dirigeante ? Question douloureuse, mais qui peut se poser au sein de l’entreprise. En effet, si certaines équipes dirigeantes ont été à la hauteur durant la crise sanitaire en prenant les bonnes décisions et en étant exemplaires, d’autres ont pu montrer leurs limites en termes de solidité, de cohésion, de responsabilité. Comment obtenir l’adhésion, la confiance des collaborateurs, qui plus est des managers pour le futur, lorsque l’équipe dirigeante s’est montrée visiblement défaillante ? L’heure est peut-être venue de reconstituer « la tribu dirigeante ». Une tribu faite de compétences et profils complémentaires, dépourvue de querelles d’egos et d’ambitions autres que celle de surmonter la crise économique. De cette nouvelle équipe doit naître rapidement une nouvelle vision à moyen terme avec des objectifs clairs, prenant le relais du mode « urgence » et fixant un cap aux managers en recherche de repères depuis le confinement. -Donner du sens ou du bon sens ? La perte ou la recherche de sens par les collaborateurs sont un enjeu fort pour les entreprises et plus encore aujourd’hui où le retour à la performance durable est vital. L’entreprise à elle seule ne peut y répondre, néanmoins son action peut se situer à deux niveaux : Le premier niveau est la cohérence entre la communication et les actes. Ainsi les valeurs affichées, les chartes RSE, les engagements, les déclarations de bonnes intentions doivent se traduire en faits. La perte de sens des collaborateurs et managers est souvent la conséquence d’un manque récurrent de cohérence entre le discours et les actions observées voire leurs absences totales. Les collaborateurs réclament à juste titre de la transparence et des actes en échange de leur confiance.  Le second niveau est la notion de bon sens et de simplicité qui doit plus que jamais guider l’action de l’équipe dirigeante. Ainsi prendre le temps d’expliquer la vision, les orientations stratégiques, les objectifs et leur rôle aux managers, dans une logique de bon sens, va renforcer leur adhésion et l’impact sur leurs équipes. Ne pas oublier de laisser aux managers de l’autonomie de décision (de bon sens) pour agir plus vite et changer plus vite. Si les managers de proximité doivent avoir un rôle prépondérant pour surmonter la crise économique, combien de temps va-t-on encore les laisser être pris entre le marteau et l’enclume du « top-down » de la direction et de collaborateurs de moins en moins disposés à exécuter sans avoir été consultés ? La solution semble être la confiance mutuelle entre dirigeant et manager avec une autonomie de décision au sein de son équipe, une efficacité et fiabilité des données « bottom-up » en retour et la création de micro-cultures d’entreprise répondant plus facilement aux aspirations des collaborateurs. Il n’en reste pas moins que cette crise a le mérite de nous obliger à porter un nouveau regard sur la fonction de manager. Roger Reynaud Directeur Général Opérationnel

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